Cette journée heureuse où j’ai trouvé une pépite d’or
Nous avons demandé à Jean-Pierre M. (ci-dessous) de nous raconter les circonstances de cette découverte.
Le 31 mai 1993, j’organise une sortie orpaillage sur le Fier en Haute-Savoie avec mon association Rhon’or. Nous connaissons déjà tous très bien cette rivière à 1h30 de Lyon et elle ne nous a jamais déçus.
Après une matinée à gratouiller les alluvions de berge, tout le monde pique-nique en se racontant de bonnes histoires. Il fait chaud, l’eau est claire, à bonne température et la batée commence à me redémanger. Je décide alors d’explorer le bed-rock, immergé sous 50 cm d’eau et constitué de marne friable avec de grandes failles striées dans le sens du courant. J’entame donc sans grande conviction puisque nous n’avions jamais rien trouvé dans ces conditions, à la pelle, sans pompe manuelle à l’époque. Par contre j’adore faire la batée debout, le fil d’eau au niveau du ventre. Les cailloux glissent le long des jambes et les vairons viennent vous téter les mollets. Après quelques batées stériles, ma pelle à charbon se niche dans une petite marmite pas plus grande que le poing de la main. Je remonte alors un 1/3 de pelle pleine de glaise parsemée de plombs de chasse et quelques hématites. Étonnant car cette marmite était très visible et facilement accessible, surtout dans cette zone hyper orpaillée depuis des années.
Source « Chercheur d’or«Après 2-3 mouvements de batée, les plombs apparaissent,
et au 4ème tour… le soleil m’étincelle une belle couleur jaune d’environ 1cm2.
Bizarre… le doute me prend, je regarde discrètement à gauche, à droite car il était courant de se balancer discrètement des morceaux de brasures dans les batées. Mais ce jaune là, je le connais très bien. A ce moment précis, le palpitant commence à prendre des pulsations, je suis maintenant persuadé que c’est une pépite et commence à fabuler sur sa taille car il reste encore une épaisseur de 3 cm de sable noir et plombs à évacuer. J’imagine alors ne voir que la surface de l’iceberg… J’y mets les doigts de suite ou pas ? Ha que nenni ! préférant savourer ce moment si rare. Encore quelques vibrations, rien ne bouge, le lit de plombs empêche la bête de descendre. Je la saisis alors des doigts et suit soudain envahi par 2 sentiments : la joie et le bonheur de trouver enfin une pièce unique et la frustration par rapport à sa taille réelle (L : 16 mm, l : 13 mm, H : 3 mm). J’analyse rapidement qu’il s’agisse bien d’or naturel et non d’un morceau de bijou ou autre et c’est alors que j’explose d’un cri rageur ‘’Gooooold !’’ auprès des autres orpailleurs qui étaient à 10 m de là en train de ranger leurs sacs de bouffe. Revenant sur la berge, je la soupèse et l’estime à 6-8 gr, elle n’en fera au final que 4.92 gr, vidée et désossée. Tout le monde la contemple avidement et j’entends déjà les premiers sarcasmes et doutes de quelques-uns. Mais au fond de moi je jubile, c’est une trouvaille qui n’arrive qu’une fois dans sa vie et je profite de l’instant présent. Dans les heures suivantes, l’endroit fut ratissé jusqu’au soir sans aucun résultat. D’ailleurs le 1er coup de pelle dans cette mini marmite avait tout récolté, il ne restait même plus un grain de sable. A y réfléchir je pense avoir bénéficié d’un heureux concours de circonstances : temps estival, eau claire et chaude, taille pelle idéale, esprit décontracté et bien-être global. Le plaisir n’en a été que plus grand.
Cette belle journée de mai 1993 me restera gravée à jamais et j’ai encore bien en tête tous ces ressentis comme si c’était hier. Pour la petite histoire on s’était tous juré de ne pas dévoiler cette découverte pendant 3 mois… J’y suis retourné en Septembre pour y découvrir un vrai champ de mines et n’y ai plus rien reconnu… lamentable.Voilà maintenant 34 ans que j’orpaille pas mal de rivières et ruisseaux de France et je ne pense pas retrouver aussi gros, alors actuellement mon plaisir se dirige davantage vers la prospection que vers l’orpaillage proprement dit, en utilisant le web pour affiner : cartes géologiques, Google Map, GéoPortail, et autres. Chaque année je prospecte donc cette rivière par tronçons de 20 km depuis sa source et aujourd’hui je suis en mesure de localiser approximativement la source de cet or, affaire à suivre…
Sur la photo Verso (ci-dessous), on distingue des traces d’éraflures, je pense que c’est des marques de pelle.